Au cours d’un RDV avec un DRH pour lui présenter mon offre de service est venue la question de ma légitimité sur la question du burnout : « Pourquoi vous êtes-vous lancé dans la vente de stages de formation pour la prévention individuelle du burnout et pour la sensibilisation du management à ces enjeux ? » 

La question était bienveillante et posée sans piège, simplement une curiosité de mon interlocuteur cherchant à comprendre pourquoi je me suis lancé dans cette activité et avec quel bagage.

Vaste question à laquelle je me suis dit qu’il ferait du sens d’en faire un post ou un article sur LinkedIn. L’exercice n’est pas évident en ce qu’il oblige à se dévoiler et à se mettre « à nu ». Pourquoi raconter son histoire sur la toile ? Finalement parce que je pense que ma place est là et qu’il est de mon devoir d’alerter les entreprises sur ce syndrome d’épuisement professionnel mal connu et qui représente un gâchis humain et économique incommensurable. Humain parce qu’il détruit la personne, littéralement. Economique parce que les entreprises ont également tant à y perdre : compétences, impacts organisationnels, marque employeur, contentieux, etc.

Donc les questions :

  • qu’est-ce qui peut décider un père de famille nombreuse (6 enfants de 17 à 5 ans) de prendre le risque de se lancer dans entrepreneuriat alors qu’il gagnait confortablement sa vie en occupant des fonctions de DRH ?
  • qu’est-ce qui peut motiver cette prise de risque en décidant de « plaquer » cette fonction RH pourtant si passionnante pour un nouveau projet sur la prévention du burnout ?

Il y a autant de burnout que de personnes et autant d’explications au burnout que d’histoires de vie. Il y a le burnout des jeunes qui découvrent après 4, 5 ou encore davantage années d’études que leur choix de métier n’est pas le bon. Il y a le burnout des personnes qui ont une véritable addiction au travail et qui finissent par le payer. Il y a le burnout de la personne qui a été harcelée, moralement ou sexuellement ou qui a été agressée et qui ne s’en relève pas ou difficilement. Le burnout lié à la crise de la quarantaine qui interroge sur le sens de sa vie et de son travail, etc.

Et il y a le mien, qui démarre à 38 ans à l’occasion d’un changement de poste qui ne se passe pas comme prévu. Les années précédentes, je m’étais sur-investi dans mon travail allant parfois jusqu’à être présent sur site à 7h00 le matin et jusque 19h ou 19h30 passés. Sans réelle pause déjeuner. Pris dans un engrenage du « tout faire », « mieux faire » et ne voulant pas décevoir. Ni ma hiérarchie, ni mes collègues, ni les salariés.

En m’investissant ainsi, je suis passé à côté de belles occasions de voir grandir mes enfants. Je rentrais le soir fatigué, stressé, incapable de couper mon téléphone et mes emails et pris dans une spirale d’addiction au travail. Le travail me tenait et je ne travaillais plus pour vivre mais je vivais pour travailler. Abandonnant au passage mes hobbies, mes amis et tout ce qui faisait le sel de l’existence. Avec un besoin de reconnaissance extrêmement important.

M’investissant dans un nouveau poste, dans une nouvelle entreprise, je suis reparti sur le même rythme ajoutant en outre une bonne heure de voiture aux trajets quotidiens. Avec de nouveau un investissement très fort et voulant aller vite. Trop vite. Et j’ai fini par m’écrouler. Littéralement. Incapable de reprendre le travail après avoir quitté cette entreprise. Incapable de former le moindre projet ou la moindre envie de travailler. Cela a duré 16 mois.

Ce n’est qu’avec du recul, que j’ai réussi à prendre conscience des nombreux signaux d’alerte que mon corps (et mon esprit) m’avait envoyé avant l’écroulement :

  • des maux de ventre qui s’étaient transformés en ulcères gastriques,
  • un manque de sommeil et une fatigue persistante,
  • une difficulté de concentration malgré le travail,
  • des erreurs inhabituelles dans mon activité professionnelle,
  • des colères exprimées plus souvent – notamment à la maison vis-à-vis des enfants,
  • etc.

Et sur le coup, malheureusement, je ne voulais pas y croire, ni voir que cela n’allait pas. Que je n’étais ni sur le bon chemin, ni sur la bonne pente. Ce qui m’aurait manqué à cette période-là, je l’ai visualisé après, justement, en réfléchissant à l’activité professionnelle que j’ai imaginée :

  • sortir de mon quotidien,
  • avoir du temps pour réfléchir et prendre du recul,
  • avoir du temps pour une activité manuelle,
  • avoir du temps pour échanger avec des personnes dans une situation comparable à la mienne,
  • être accompagné par des personnes dont c’est le métier,
  • reposer des bases saines et être « outillé ».

Je ne vais pas dire que j’ai eu la chance de connaître le burnout mais j’ai la chance de savoir de quoi on parle. Et depuis, je me suis formé, j’ai repris des études, repris le chemin de la faculté et des écoles. J’ai lu, beaucoup, pour comprendre ce mal insidieux qui se dissimule dans le quotidien et qui finit par faire craquer.

Et puis j’ai imaginé cette activité. Avec l’envie d’offrir aux salariés, comme aux entreprises, une solution pour limiter les burnout. Pour prendre le mal à la racine et éviter ce formidable gâchis.

J’ai cherché un nom pour cette entreprise et c’est mon épouse qui me l’a suggéré : « tu connais le kintsugi ? » Cela résonnait bien avec mon enfance passée au Japon.

L’art du kintsugi, consiste à réparer les objets cassés en les recollant et en soulignant leurs jointures à la poudre d’or. Non seulement reconstruit, l’objet s’en trouve également sublimé. L’histoire raconte qu’au XVème siècle, le chef de guerre japonais Ashikaga Yoshimasa casse son bol préféré lors de la cérémonie du thé. Renvoyé en Chine pour réparation, il récupère le bol rafistolé à l’aide d’agrafes métalliques. Déçu, il confie à ses artisans japonais la mission de réparer son bol de manière plus artistique. Ceux-ci inventent alors l’art du kintsugi.

Pour les japonais, il est erroné de penser qu’un objet brisé en morceaux perd toute sa valeur et sa beauté. Les éclats peuvent toujours être assemblés, recollés, voire sublimés pour donner une nouvelle forme à l’objet.

Cette philosophie est belle, prônant la résilience et la persévérance. Cela faisait du sens pour moi de donner pour nom à ma société « Kintsugi RH ». Un lien entre les RH, les Richesses Humaines et cette conviction que j’ai que nul n’est parfait, que chaque personne a ses failles et ses zones d’ombre mais également ses points d’appuis pour sortir fortifié de ses moments de doute, de fragilité et de ses échecs.

Mais le nom ne suffit pas à faire une offre. Alors j’ai travaillé avec une équipe, avec des personnes que je ne connaissais tout d’abord pas. Et qui ont eu la gentillesse de me consacrer de leur temps, de leur énergie puis de leur amitié pour faire sortir ce projet de terre. Et comme il est question de céramique, et de terre en particulier, nous avons imaginé des programmes qui mettent l’art du kintsugi au centre de notre approche. Pour faire expérimenter la casse, la réparation et permettre le questionnement.

Voilà, comme ça vous savez maintenant pourquoi un ancien DRH a pris le risque à 40 ans passés de monter une société pour proposer une offre singulière aux entreprises pour préserver leurs richesses humaines. 

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